Portage salarial : coup de gueule d'une femme chef d'entreprise - AASTI

Ce nouvel accord ne répond pas aux besoins économiques !

Le 13/06/2013 par l'agence SAVEREUX RP         Retour à la salle de Presse

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Eliane COLLOMB, Dirigeante d'AASTI Portage - Aide Assistance et Soutien du Travailleur Indépendant

Eliane COLLOMB, Dirigeante d'AASTI Portage - Aide Assistance et Soutien du Travailleur Indépendant
"Vive le portage entrepreneurial !"

Site : http://www.aasti.fr/

Avec la publication au Journal Officiel du 8 juin 2013 de l’arrêté du 24 mai 2013 du ministère du Travail, l'accord paritaire de 2010 sur le portage salarial est devenu applicable à l'ensemble des 300 sociétés de portage françaises.

Apparue dans les années 80, cette forme de travail importée des Etats Unis permet à un professionnel (le porté) de proposer ses services à une entreprise cliente qu’il aura lui-même démarchée, sans créer son entreprise. Sa prestation est facturée par l'entreprise de portage qui lui rétrocède les sommes encaissées, après déduction des frais de gestion (6 % chez AASTI) sous forme de salaire. Cet « entrepreneur porté » maîtrise donc complètement son activité et sa clientèle tandis que sa société de portage se charge des formalités administratives, comptables et juridiques.
Tout comme le président de société, le porté bénéficie du régime du « salariat ».

Contractualisation d’un accord entre le client et le porté, souple et rapidement opérationnelle, cette formule est adaptée à celles et ceux qui veulent exercer, parfois tester, une activité entrepreneuriale en totale indépendance, avec le minimum de contraintes.

Une dérive grave
Or, l’extension de l'accord national professionnel du 24 juin 2010 à l’ensemble de la profession introduit une relation de subordination entre l’entreprise de portage et le porté. Le nouvel accord prévoit en effet pour le porté un statut cadre, un salaire fixe mensuel de 2900 € brut (temps plein), et… une durée limitée à 3 ans ! Le porté devient à la fois salarié « intérimaire » et un apporteur d’affaires pour l’entreprise de portage ! souligne Eliane COLLOMB, Dirigeante de l’entreprise de portage AASTI et vice-présidente de la Fédération Européenne du Portage Salarial (FEPS) qui représente plus de 75% des acteurs français du portage salarial. Et la question se pose maintenant de ceux dont l'activité ne permet pas de générer un chiffre d'affaires suffisant…!

Il y a là une dérive grave qui assimile l’activité de portage à la mise à disposition de personnel. Du Portage Pour Tous des origines, le portage prévu par ce nouvel accord devient élitiste et réservé à une catégorie de personnel ! Or, le porté ne recherche pas un contrat de travail ni une sécurisation d’employé mais bien un statut juridique stable qui lui permet d’être considéré et d’exercer en tant qu’indépendant, véritable « chef d’entreprise ».

Le nouvel accord ne répond pas aux besoins économiques
Aujourd’hui, l’esprit d’entreprendre a besoin d’être stimulé et encouragé, pas d’être cadré en lui donnant pour seule base le contrat de travail. Une société de portage n’a jamais été, n’est pas et ne doit pas devenir un employeur ! ajoute Eliane COLLOMB. Si l’encadrement de la profession était nécessaire, cet accord dénature ce qui faisait l’intérêt d’une formule qui a conquis en France près de 20 000 professionnels indépendants et….leurs clients !
Une solution d’avenir pour les entreprises repose sur plus de souplesse. Aujourd’hui, les entreprises n’embauchent pas et se tournent vers l’externalisation de missions courtes, moyennes et longues durées. Non seulement, le portage s’impose comme une solution à la problématique d’embauche des entreprises, mais il se révèle également générateur d’activité dans une période de crise de l’emploi et du pouvoir d’achat. De par son cadre juridique, il apporte même de la crédibilité au porté ! Si tout le monde est d’accord avec la sécurisation, cela ne doit pas se faire au détriment de la souplesse entrepreneuriale! Cet accord va contre l’emploi qu’il est censé protéger !

Déjà en mai 2011, à la demande du Ministre du travail de l’époque, l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS)* avait émis un avis négatif et le gouvernement à son arrivée en 2012 avait refusé d'ouvrir la voie à son application. L'IGAS justifiait alors son avis par le fait que le dispositif est réservé aux seuls cadres, « en contradiction avec la jurisprudence » et proposait de laisser accessible le portage à tous, d’envisager l’opportunité ou non de permettre une activité pérenne, d’organiser un accès pour les portés au régime du salariat hors contrat de travail, comme il en existe déjà… Le 23 mai dernier, une sous-commission de la Commission Nationale de la Négociation Collective (CNNC) a donné son feu vert à l’extension du texte, permettant ainsi la publication de cet arrêté, daté du 24 mai.

Le portage… entrepreneurial, une nécessité !
Selon la Fédération Européenne du Portage Salarial, en limitant son champ d’application aux cadres, cet accord exclut de fait plus de 54% des portés en activité ! A terme cela pourrait limiter à 50 000 le nombre des professionnels qui créent leur activité en portage au lieu d’un potentiel estimé à 600 000.

Eliane COLLOMB ne compte pas en rester là, à en croire le grand nombre de portés inquiets de cette évolution de la législation venant freiner l’activité d’une profession qui aurait surtout besoin d’un statut… plus adapté aux réalités économiques. L’enjeu est de faire reconnaître aux portés un statut de chef d’entreprise plutôt que de transformer les portés en personnel mis à disposition des clients de la société de portage…

Un autre signe est la croissance récente des adhésions à la Fédération Européenne du Portage Salarial qui montre que finalement avec ce nouvel accord, le portage entrepreneurial est bien… vivant !

*IGAS : service interministériel de contrôle, d’audit et d’évaluation des politiques sociales pour éclairer la décision publique. Elle réunit 130 experts de la Cohésion sociale (Famille, Protection de l’enfance, Lutte contre l’exclusion, Travail social…), de la Protection sociale (Sécurité Sociale, Prestations sociales....), du Travail, emploi, formation professionnelle, et de la Santé.